Le docteur Stoller avait redoublé de menaces. Il n'avait pas hésité à faire revenir mes deux kidnappeurs pour m'impressionner. Or, c'est pour Eléanore que j'ai fini par accepter son marché. Je lui ai demandé en retour de me donner des feuilles et un stylo pour que je puisse écrire et ainsi me détendre avant de passer à l'action. Eléanore ne me pardonnera peut-être jamais de la faire souffrir mais je n'ai pas le choix. Malgré ses airs de scientifique totalement inoffensif, le regard limite psychopathe de Stoller me faisait comprendre qu'il était capable de tout et qu'il avait les ressources nécessaires.

A peine ai-je remis les pieds dans ma chambre que j'aperçois le docteur d'Eléanore surgir à nouveau de l'autre côté de la vitre.Je décide de ne pas y faire attention et d'immédiatement m'asseoir pour écrire. Face à moi, une porte blanche. Cela commence à être une habitude. Une habitude angoissante qui plus est. Un dernier regard vers Eléanore puis l'inspiration me vient tout à coup.

J'aime regarder chaque recoins de son visage pour deviner qui elle est. Analyser chacun de ses gestes, chacune de ses mimiques pour comprendre ce qu'elle essaie de me dire. Ses cheveux, qu'elle avait essayé tant bien que mal de coiffer, restent tout de même légèrement ébouriffés, ce qui lui donne ce côté imparfait que j'aime tant. Son sourire me réconforte, son regard me bouleverse...

A cette dernière phrase je pose mon stylo. Je ne serais tout de même pas... amoureux ? Et pourtant ces mots sont sortis si naturellement qu'ils ne peuvent être que le reflet de ce que je pense réellement. A-MOU-REUX. Je me répète ce mot syllabe par syllabe dans la tête. J'ai l'impression de découvrir un nouveau terme. Peut-être que je m'emballe un peu trop vite ? Je n'ai jamais rien ressenti pour une femme, ce qui n'est pas très étonnant en vue du peu de contact que j'ai avec le monde extérieur. Je n'ai pas envie de faire parti de ceux qui se font des films juste parce qu'une fille lui a sourit... et pourtant, j'ai la réelle sensation que quelque chose se passe.

Je reprends alors mon stylo, relis ma dernière phrase et me décide à continuer.

Je ne sais pas ce que je ressens mais j'adore ça. Est-ce mal ? Peu importe ce qu'elle éprouve. Elle a débloqué une partie de moi que je ne connaissais pas, celle qui ressent quelque chose pour autrui. Je ne me considère pas comme quelqu'un sans cœur, loin de là. Avant, il n'y avait que ma famille et Eliott. Maintenant, Eléanore ale droit à sa place dans son univers. Peut importe si l'amour que j'éprouve pour elle est réciproque ou non. Je suis tout simplement heureux de ce qu'elle provoque chez moi. Pour la toute première fois, je me sens vivant.

Je m'arrête une nouvelle fois, assez satisfait de ce que je m'avoue à moi même dans cet écrit. Je relis attentivement chacun de mes mots.Une fois terminé, je tourne la tête vers Eléanore. Ses petits yeux sont en train de m'observer. Je me sens alors soudainement paralysé.