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saison 1, Chapitre 9 « C'est tellement bon... » saison 1, Chapitre 9

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— Que venons-nous faire ici ?

J’avance dans le parking avec une certaine tension. À présent, fini la rigolade.

— Je veux y retrouver quelqu’un.

— Dans un fast-food ?

— On ne juge pas sur l’apparence. On ne t’a jamais appris cela ?

Je franchis les voies de vente en drive et rentre sur la terrasse. L’heure du déjeuner approche et déjà plusieurs personnes s’installent sur les tables mises à disposition.

Face Ă  la porte, je m’arrĂŞte instantanĂ©ment, pĂ©trifiĂ© devant cette Ă©tape ultime. Lorsque j’aurais passĂ© cette limite, je ne pourrais plus opĂ©rer un demi-tour. Est-ce vraiment ce que je veux ?

— Je peux comprendre ?

Crit s’avance sur mon bras tendu et me fait signe pour que je revienne Ă  la rĂ©alitĂ©. Je me laisse trop souvent porter par mes pensĂ©es et je me noie, je disparais de ce monde… Quel monde ? Tout est remis en question…

J’actionne le battant et visualise la salle. L’accès aux toilettes sur la droite, puis les guichets et face à moi, la porte qui m’a douloureusement embrassée. Je sens mon hématome gonflé et faire acte de présence.

Je glisse rapidement sur la gauche pour contourner deux piliers et m’installer sur un canapé derrière une paroi transparente. Je peux y voir la cuisine sans être trop exposé.

— Dans le principe, on doit commander avant de s’asseoir. Je prendrais bien un sunday, moi.

Le crayon descend sur la table et se fixe devant moi. Cette fois, je n’y échapperais pas.

— Je…

— Ça pue la rose !

— Chuuuut ! Moins de bruit ! On pourrait t’entendre.

— Elle se cache oĂą ?

— Qu… Qui ça ?

Il se tourne vers les clients et scrute l’ensemble de la salle.

— Qu’est-ce que tu cherches ?

— Je ne suis peut-être qu’un esprit qu’on incarne dans des objets, mais je sais reconnaître l’amour quand je le vois.

— AAAAH, mais qu’est-ce que tu dis ?

Sans m’en rendre compte, je viens d’attirer toute l’attention sur moi. Pour ne pas être complètement repéré, j’attrape Crit et simule une écriture.

— Mais lâche-moi et montre-la-moi plutĂ´t. Tu veux que je t’aide pour la sĂ©duire, c’est ça ?

Je continue de scribouiller sans feuille et chuchote pour lui répondre.

— Tu le peux vraiment ?

— Eh, tu parles à un représentant du diable… Je peux tout accomplir.

Décidément, rassurer ne fait pas partie de ses capacités.

— C’est laquelle ?

— Je ne la vois pas. Elle n’est pas encore arrivée.

— Comment l’as-tu rencontrĂ© ?

— Euhhhh… Je l’ai braqué cette nuit…

Je sens le crayon se figer, ce qui paraĂ®t assez ordinaire finalement. Rien ne l’est plus vraiment depuis hier ?

Un rire retentissant se fait entendre. De nouveau, les clients se tournent vers moi, ce qui m’oblige à m’esclaffer à mon tour pour couvrir Crit.

— Alors toi ! Je vais me faire dessus ahahahah ! Tu es tombĂ© amoureux de la femme que tu as menacĂ©e. C’est un bon point de dĂ©part pour une relation. Tu devrais lui offrir des menottes pour votre prochaine sortie ensemble ahahahah !

— Ferme-là ou…

— Tout va bien, monsieur ?

Eh merde, je suis foutu. Je me tourne et aperçois l’uniforme du restaurant.

— Je… Excusez-moi, je suis un peu chamboulé en ce moment.

— Jusqu’à mettre en pĂ©ril la vie d’autrui ?

Il place son téléphone devant mes yeux. J’y découvre une image de caméra, figée, sur laquelle je me reconnais avec mon pistolet factice en main.

C’est l’instant idéal pour se sentir merdeux et ne pas savoir où se dissimuler.

— On peut discuter en privĂ© ?

Je me lève sans chercher Ă  contredire les faits. Il s’avance vers la porte de service, sans mĂŞme s’assurer que je le suis bien. Crit ne bouge plus et n’émet plus un son, ce qui me dĂ©stabilise d’autant plus. Un peu de drĂ´lerie, une blague pourrie, quelque chose qui puisse rendre l’humour Ă  cet Ă©pisode qui part en cacahuètes, s’il vous plaĂ®t !

Nous sortons du bâtiment et nous retrouvons dans la zone déchet, à l’abri des regards derrière un grillage rigide et opaque. L’homme s’est arrêté, me tournant le dos. Son attitude m’interpelle, et je prends conscience que la situation ne relève rien de logique.

— Pourquoi m’avez-vous emmenĂ© ici ?

Pas de rĂ©ponses. Sa tĂŞte semble rentrĂ©e dans les Ă©paules, les bras lĂ©gèrement Ă©cartĂ©s du corps, comme s’il se prĂ©parait… mais Ă  quoi ? Je commence Ă  trembler et Ă  me perdre dans des pensĂ©es et des gestes absurdes.

— Qui ĂŞtes-vous ? Que me voulez-vous ? Je n’ai rien fait de mal… Je ne comprends pas !

— Tu l’as agressĂ© !

Cette voix… ténébreuse, rocailleuse… non humaine. Je frissonne sous les impulsions des frémissements électriques. Je suis terrifié devant les faits, il n’y aura donc rien de drôle dans l’épisode de cette semaine…

Il se retourne doucement, je peux apercevoir ses veines se durcir sur chaque portion visible de sa peau.

— Tu ne dois pas toucher Ă  Pauline !

— Oh… C’est votre copine… Je suis désolé… Ce n’était qu’une blague, je n’avais aucune mauvaise intention…

La surprise me coupe littéralement la parole. Je découvre son visage et reconnais l’homme qui s’occupait du drive pendant mon braquage. Ses yeux apparaissent totalement noirs et sa bouche se déforme sous de curieuses convulsions.

— Il devrait arrêter la prise de protéines, cela provoque des effets secondaires bien étranges…

Crit me secoue les doigts pour à nouveau me ramener en état de conscience.

— C’est vraiment n’importe quoi cet Ă©pisode. Depuis quand a-t-on des zombies dans Smile ? C’est dĂ©cidĂ©, je reprends la main. DĂ©jĂ , tu vas me remuer ton cerveau pour me trouver une musique adaptĂ©e, et ensuite, on s’occupe du cocu de service.

— Gnéééé ?

— REVEILLE-TOI, BORDEL DE MILLE MILLIARDS DE MILLE SABORDS !

Crit me frappe le nez Ă  plusieurs reprises.

En l’observant, j’aperçois derrière lui une immense aura obscure s’extirper de l’homme. Gnéééé… Side by side de BewhY se lance dans ma tête. Mes poils se hérissent sous la mélodie, mes muscles se tendent et Crit vient se placer sur mon épaule droite, dans une position d’assistant au combat. Rien ne peut m’arriver, je suis un superhéros après tout.

— Tu te sens prĂŞt ?

— Ce n’est pas un pet foireux qui va m’arrêter.

— Tu sais, je me dois de me montrer sincère avec toi. On forme une équipe maintenant et je m’en voudrais de ne pas l’être. Pour rester clair, tu n’as aucune chance.

Je manque de m’effondrer en avant en perdant ma position de combat. Bonjour la confiance…

— Sympa… Tu me proposes quoi ?

— Tu me transfères… Ah ben non… j’avais oublié… Tu ne maîtrises pas la technique…

— Ok, j’ai compris le message. Je vais me démerder comme d’habitude.

— Non, je ne crois pas… Ce n’est pas un simple chevalier.

La nappe noire vient nous envelopper dans une sorte de bulle, l’ennemi se transforme en véritable montagne de muscle.

— Il a bien changé Hulk… Appelle Stark, j’ai besoin de son armure spéciale.

— Ça a Ă©tĂ© sympa le temps que cela a durĂ©. Tu es un type bien, hein, mais je crois que j’irais plus loin avec lui quand il t’aura explosé… Mais qu’est-ce que tu fous ?

— Tu vas m’aider !

Je me projette en avant à toute vitesse et me jette pour glisser entre les jambes du monstre, en évitant ses grosses paluches qui viennent s’écraser sur le sol. L’adrénaline s’enflamme et pousse l’euphorie à son extrême ce qui me permet, au passage, de planter profondément Crit dans son fion.

Les deux lâchent un hurlement mutuel et coordonnĂ© qui me rĂ©chauffe le cĹ“ur. ENFIN !!! C’est tellement bon l’humour, mĂŞme Ă  petite dose.


Texte publié par Calamus, 1er avril 2022
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