Les deux gardes firent un pas en avant, leurs muscles bandés, leurs yeux brillants d’une vigueur agressive. Leurs visages étaient des masques de détermination, des adultes imposants face à ce qui leur semblait n’être qu’un gamin arrogant. Le petit noble, un sourire cruel aux lèvres, les regardait avec la certitude que sa volonté allait être exécutée.
« Il refuse ? Prenez-le ! » ordonna le jeune noble, son éventail claquant dans sa paume.
Les gardes se jetèrent sur Trass. Ils étaient rapides, entraînés, mais leur force physique, même pour des adultes aguerris, n’était rien face à ce qui grouillait en lui. Trass sentit la vague monter, incontrôlable. Ce n’était pas de la peur, mais une poussée immense, une pression interne qui cherchait à s’échapper. C’était la même puissance qui avait pulvérisé le loup, mais cette fois, elle était amplifiée par la colère et le sentiment d’injustice.
L’un des gardes tenta de le saisir par le bras. Trass, sans réfléchir, repoussa la main. Un son sec et brutal claqua dans l’air. Le bras du garde se tordit dans un angle impossible, un craquement répugnant résonna, et l’os blanc, brisé, perfora sa chair en une fracture ouverte et sanglante. Le garde fut projeté en arrière avec une force absurde, s’écrasant contre le mur de l’école dans un bruit sourd et écœurant. Il glissa au sol, un filet de sang s’échappant de ses lèvres tandis qu’il toussait du sang, ses yeux révulsés se voilant avant de s’éteindre. Il était inconscient, à peine vivant.
Le second garde, stupéfait par la vision de son camarade et le geyser de sang qui avait éclaboussé le mur, hésita un instant, le visage soudain blême. Le petit noble, le sourire figé, vit la scène avec des yeux écarquillés, l’éventail tombant de ses doigts.
« Qu’est-ce que… ? » balbutia le noble, sa voix n’étant plus qu’un filet.
Ce fut à cet instant que Maître Lin, le professeur, attiré par le tumulte, arriva en courant. Il comprit la situation en un coup d’œil, l’horreur gravée sur son visage.
« Arrêtez ! Jeune maître, calmez-vous ! » s’écria Maître Lin, tentant de s’interposer, les mains levées, désespéré.
Mais la vague de puissance en Trass était déjà trop forte. Le second garde, reprenant ses esprits, s’élança de nouveau, cette fois avec une rage froide et désespérée, sortant un petit couteau de sa ceinture. Trass, les yeux fixes et le regard vide d’émotion, sentit la menace, et sa force explosa. Il ne se souciait plus de contrôler. Son poing, chargé d’une énergie invisible, s’abattit sur le garde. Ce fut moins un coup qu’une libération d’énergie brute, concentrée, dévastatrice.
Le corps du garde éclata littéralement en une gerbe écarlate de chair, d’os brisés et de viscères, ses membres projetés dans des directions opposées avec un craquement effroyable, et il s’effondra en un tas inerte et méconnaissable. Le petit noble, qui s’était relevé tant bien que mal, fut frappé de plein fouet par un fragment du corps du garde. Son visage se figea dans un masque de pure terreur, et il tomba lourdement, sa nuque se tordant dans un angle grotesque. Un râle mourant s’échappa de ses lèvres avant qu’il ne s’immobilise, les yeux vitreux fixés sur le ciel. Son sang tachait désormais sa soie dorée et rouge, se mêlant à celui du garde.
Le silence retomba, lourd, seulement brisé par le halètement horrifié de Maître Lin. Trass regarda sa main, puis les restes sanglants du garde et le corps brisé du jeune noble, le sang noir s’étalant rapidement sur le pavé. La peur qu’il avait ressentie face aux loups, celle de la perte de contrôle, revint avec une intensité décuplée. Il l’avait fait de nouveau. Il avait tué. Et cette fois, c’était deux hommes, dont un noble, et la conséquence serait bien plus grave.
Maître Lin, les mains tremblantes, regarda alternativement Trass et les corps inertes. « Par tous les Dieux… Que… que s’est-il passé ?! »
« Il faut partir, Maître Lin, » dit Trass, sa voix étrangement calme malgré le chaos intérieur. « Ils vont revenir, et cette fois, ce seront des soldats. »
Le professeur, encore sous le choc, hocha la tête, la réalité de la situation le frappant de plein fouet. Son école, sa réputation, sa vie… tout était en jeu. « Oui ! Oui, suivez-moi ! Les ruelles ! »
Ils s’enfuirent, Maître Lin, malgré son âge, courant avec une surprenante agilité, connaissant les recoins et les passages secrets de ce quartier des bas-fonds. Trass le suivait, le cœur battant, mais son esprit d’une clarté effrayante. Il venait de comprendre que sa force était une arme à double tranchant, une bénédiction et une malédiction.
Après quelques minutes de course effrénée, ils s’abritèrent dans un cul-de-sac obscur, à l’abri des regards. Le silence était pesant. Maître Lin, la respiration haletante, s’appuya contre un mur.
« Ma famille… » murmura Maître Lin, la peur étreignant sa voix. « Ils ne me laisseront pas m’échapper seul. Ils s’en prendront à ma famille. Je dois les sauver ! »
Trass resta silencieux un instant, ses yeux observant le désespoir du professeur. Il se souvenait des paroles d’Uruel, de l’importance de la confiance, et de ce que l’âme de l’espace lui avait suggéré comme solution ultime : le contrat d’existence. Il savait que Maître Lin ne le trahirait probablement pas sciemment dans cette situation, mais la menace sur sa famille et la pression des nobles pourraient le forcer. La confiance était une chose fragile dans ce monde.
« Maître Lin, » commença Trass, sa voix ferme. « Je peux vous aider. Je peux protéger votre famille. Mais en échange, vous devrez me faire confiance, entièrement. Il y a un moyen de vous lier à moi, vous et votre famille, pour qu’ils soient en sécurité dans un lieu où personne ne les trouvera. Mais cela signifie que vous ne pourrez jamais me trahir. »
Maître Lin le regarda, les yeux perdus. « Un moyen… de se lier ? Que voulez-vous dire ? »
« C’est un contrat d’existence, » expliqua Trass, se remémorant les paroles d’Uruel. « Une connexion énergétique profonde. Ceux qui le signent deviennent des serviteurs liés à mon être. Ils ne peuvent pas me trahir, et en retour, je les protège et je subviens à leurs besoins. C’est une protection absolue, mais aussi un engagement éternel. »
Le professeur hésita. Le poids de la décision était immense. Renoncer à sa liberté la plus fondamentale pour la sécurité de ceux qu’il aimait. Mais la menace qui planait au-dessus de sa famille était bien réelle, et la démonstration de la puissance terrifiante de Trass était encore fraîche dans son esprit. Cet enfant… il était un monstre, oui, mais peut-être aussi leur seul salut.
« Si cela peut les sauver… je l’accepte, jeune Maître, » dit Maître Lin, la voix brisée par l’émotion mais ferme dans sa résolution. « Faites ce que vous devez. »
Trass hocha la tête. « Bien. »
Ils sortirent du cul-de-sac, avançant avec prudence dans les ruelles. Leurs sens étaient en alerte, évitant les patrouilles qui ne manqueraient pas de quadriller le quartier à la recherche du meurtrier des gardes et de l’assassin du noble. Il fallait trouver la famille de Maître Lin.
Ils arrivèrent discrètement devant une petite maison. La femme de Maître Lin, Madame Lin, une femme douce et préoccupée, les accueillit, son fils d’environ quinze ans, Lin Hao, et ses deux filles jumelles de dix ans, Lin Li et Lin Mei, terrifiés par le retour précipité de leur père, se tenant derrière elle.
Maître Lin expliqua la situation à sa famille, la gravité de leur position, la puissance de Trass, et la proposition du contrat d’existence. L’angoisse sur leurs visages était palpable. Mais la confiance dans les yeux de Maître Lin et la pureté (malgré sa puissance dévastatrice) qu’ils percevaient chez Trass les convainquirent. Ils acceptèrent.
Trass les fit tous entrer dans son espace personnel. Le visage de la famille Lin s’illumina de stupéfaction en découvrant l’étendue verdoyante et le soleil éternel de ce lieu. C’était un paradis inattendu.
Uruel, plus brillante que jamais, apparut au centre de la prairie. Elle expliqua les termes du pacte plus en détail, la nature du lien indéfectible, mais aussi la sécurité et la protection qu’il apporterait. Un à un, la famille Lin, à commencer par Maître Lin, puis Madame Lin, Lin Hao, Lin Li et Lin Mei, posèrent leur main sur le sol, et Uruel créa les marques de contrat. Une douce lumière violette émana de chaque individu, reliant leurs énergies à celle de Trass.
À chaque signature du pacte, Trass sentit une vague de vitalité affluer en lui, une énergie douce mais constante. Et à chaque fois, un changement spectaculaire se produisit dans son espace. Les murs de brouillard qui délimitaient son domaine se mirent à reculer à grande vitesse, révélant de plus en plus de terrain. Non pas une prairie vierge, mais des champs en friche et des terres abandonnées, bordées ici et là de bosquets sauvages. L’espace s’agrandissait considérablement, signe tangible de l’augmentation de la vitalité apportée par l’arrivée de ces nouvelles vies humaines liées à lui.
Trass regarda sa nouvelle “famille”, des serviteurs désormais liés à lui pour l’éternité, et le vaste territoire qui s’étendait devant eux. La faim d’énergie d’Uruel et la sienne prenaient une nouvelle dimension. Il avait non seulement une source de soutien, mais aussi des bouches à nourrir et un empire naissant à bâtir, ici, dans son domaine.

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