Glossaire disponible dans le prologue
Cycle des Sphères
Année de la Huitième Sphère
Ronde de la Lueur des Reflets
Lyris 25 - Auréon
Une Spirale s’était écoulée depuis la libération des enfants prisonniers de l’abbaye et des nécromanciens. Pour la première fois depuis longtemps, Suri s’accorda une pause. Elle poussa la porte du bar La Synergie, là où elle s’était rendue pour la dernière fois en compagnie de Kaye.
La pensée de son ami lui serra le cœur. Leur ultime rencontre lui revint en mémoire : il fuyait vers la forêt, poursuivi par Ella. Sa sœur lui avait confié qu’elle avait dû le sceller, le condamnant à errer entre Quenara et l’Éthéra. Le savoir à jamais seul lui faisait terriblement mal. Elle avait tenu à lui, malgré ses mensonges et ses manipulations.
Elle s’installa au comptoir, mais son esprit dériva vers le Noxen, cet instant où elle avait conduit les enfants en sécurité avec l’aide des Veilleuses du Chant de Vie. Dans les jours qui suivirent, les journalistes s’étaient précipités sur les lieux de l’incendie, avides de capter les derniers vestiges de cette sombre histoire. Par souci de protection, les enfants ne furent ni interviewés ni photographiés.
La police ouvrit une enquête, mais faute de survivants, l’affaire fut rapidement classée.
Il restait alors la question des enfants.
Heureusement, Suri avait tout anticipé. Elle s’était entretenue avec des familles prêtes à adopter, leur expliquant longuement les circonstances de leur venue au monde et les conséquences possibles sur leur développement. Une dizaine d’entre eux trouvèrent ainsi un foyer auprès de parents bienveillants.
Quant aux autres, ils rejoignirent l’orphelinat qu’elle avait fondé, avec le soutien de confrères psychologues et psychiatres. Elle leur avait offert un refuge, un espace où ils pourraient grandir, avancer et se reconstruire.
Elle veillait à ce qu’ils développent une vision équilibrée du monde, entre lumière et ombre. Avec des professionnels qualifiés, elle les accompagnait dans la compréhension et la maîtrise de leurs pouvoirs. Un soutien psychologique leur permettait également de se libérer du poids de leurs origines et de comprendre que leur naissance artificielle ne remettait pas en cause leur existence.
— Je me demandais si je vous reverrais.
La voix du barman la ramena au présent.
Suri releva les yeux. Eryas la regardait en essuyant un verre, un sourire au coin des lèvres. Elle lui rendit son sourire et s’adossa au comptoir.
— Un mojito ? demanda-t-il.
— Vous vous souvenez ?
— Comment pourrais-je oublier ?
Leurs regards s’accrochèrent. Autour d’eux, le brouhaha du bar sembla s’atténuer. Son aura vibrait en harmonie avec celle d’Eryas. Troublée, elle détourna les yeux.
Il se racla la gorge et s’éloigna pour préparer sa boisson.
— Offert par la maison, dit-il en posant le verre devant elle.
— Merci, Eryas.
Il marqua un léger temps d’arrêt avant de sourire.
— Le bruit court que vous avez changé la vie de plusieurs enfants, lança-t-il en préparant deux autres verres.
— Les rumeurs vont vite, répondit-elle en tournant le sien entre ses doigts. Mais je n’ai fait que ce qui devait être fait.
Il l’observa un instant en silence avant de partir en réserve sous les ordres de son supérieur. Lorsqu’il revint, il s’accouda au bar et plongea son regard dans le sien.
— Vous avez été courageuse, murmura-t-il. Vous avez tant fait pour eux, alors que rien ne vous y obligeait.
Elle baissa les yeux.
— Pendant longtemps, j’ai cru que le monde était simple. Que, même si l’ombre existait, les actes pouvaient toujours être justifiés. Je me trompais. Même ceux qu’on croit proches peuvent cacher de sombres intentions.
Il hocha lentement la tĂŞte.
— Vous donnez beaucoup aux autres. Mais prenez-vous seulement le temps de penser à vous ?
Elle releva les yeux vers lui. Il y avait dans sa voix une douceur sincère, une chaleur qu’elle ne pouvait ignorer. Une connexion qu’elle sentait au plus profond d’elle-même.
— Je suis pédopsychologue, j’ai fondé un orphelinat, et j’ai adopté l’un des enfants. Je suis tout sauf une priorité.
Eryas esquissa un sourire triste.
— Vous devriez pourtant. Ou alors… laisser quelqu’un le faire pour vous.
Ses doigts effleurèrent les siens avec une délicatesse troublante. Un frisson parcourut Suri. La chaleur de ce contact fit naître en elle une sensation familière qu’elle avait toujours rejetée d’un revers de main.
Elle repensa à ce que Kaye avait dit, ici même, lorsqu’il l’avait invitée à boire un verre. Il avait évoqué le mythe des âmes sœurs synergistes, ces êtres partageant la même source de pouvoir et des spécificités complémentaires, attirés l’un vers l’autre par une force à laquelle il était impossible de résister.
Elle y croyait, sans vraiment y prĂŞter attention.
Mais alors que les doigts d’Eryas touchaient les siens, que son énergie résonnait en parfaite harmonie avec la sienne, elle comprit que cette attirance n’était peut-être pas qu’une simple coïncidence.
Elle inspira profondément. Elle avait été trahie. Elle avait cru en la mauvaise personne. Mais elle avait appris. Le monde était complexe. Parfois cruel. Mais il regorgeait aussi de nouvelles possibilités.
Eryas avait raison. Elle devait s’écouter. Se laisser une chance.
Alors, pour la première fois depuis longtemps, elle décida de profiter de cet Auréon pour simplement exister, en dehors de son travail et de ses responsabilités.

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