Elle y avait pensé toute la nuit. Ces cheveux noirs mi-longs dont les pointes étaient venues lui chatouiller le creux de son cou, ces phalanges osseuses qui malgré leur incertitude et leurs tremblements étaient capables de sentir chez elle le moindre frisson, la moindre chaleur diffuse sous la peau, le moindre picotement...et cette odeur masculine et boisée, mélangée à quelque chose d'indescriptible. Lui.
Winter remua frénétiquement dans son lit, emmitouflée dans sa couverture verte ornée du blason de Serpentard. Il était temps à présent qu'elle se prépare pour commencer sa journée, mais son cerveau, lui, ne cessait de rêvasser, de revivre encore et encore la scène de la veille.
Cette fois, Severus Rogue n'avait pas fui. Il était resté avec elle et il lui avait dévoilé une facette qu'elle ignorait de lui : un feu contenu, un lac de lave bouillonnant comme une potion rougeoyante portée à température dans un chaudron en étain terne d'extérieur. Leurs baisers s'étaient rapidement intensifiés et avec des gestes hésitants et un peu réservés dans un premier temps, puis rapidement plus intenses, il l'avait tenue dans ses bras et avait commencé à explorer son dos et ses hanches à travers le tissu de ses vêtements.
Winter avait été frappée par la manière dont le Maître des Potions combinait à la fois une forme de raideur maladroite avec une tendresse, une sensibilité et une profondeur que la plupart des hommes ne pourraient jamais avoir. C'était inhérent à lui. Inné. Il ressentait tout et cela, la jeune femme était probablement la seule à l'avoir jamais découvert à ce point.
Elle sentit les muscles de son bas-ventre frémir à l'idée que leur étreinte aurait pu déboucher vers quelque chose d'encore plus torride si les rires tonitruants de Peeves, l'esprit frappeur de l'école, ne s'étaient pas fait entendre dans le couloir, accompagnés de bruits de pets grotesques. Le poltergeist avait rempli les cachots de bombes à fumier de chez Zonko, probablement fournies par Fred et George Weasley.
Malheureusement, les sorts d'isolation de Rogue autour de la porte de la salle du Club de Duel ne protégeaient en rien contre la mauvaise odeur. Ils étaient sortis en hâte de leur planque à contrecœur, leurs corps vivants et emplis de désir. Mais avant de regagner son dortoir, Winter pour la première fois avait lu dans les yeux du sorcier une promesse enrobée de crainte parce qu'il avait tout à perdre : celle d'assumer dans l'ombre, en secret.
La musicienne finit par mettre un pied hors du lit. Oscar devait déjà l'attendre au petit déjeuner. Et pour la première fois depuis qu'elle avait rencontré le ténébreux Directeur de Serpentard, elle ressentit une sensation agréable flottant en elle, celle de l'espoir.
Les jours s'écoulèrent et la routine quotidienne de Poudlard suivit son cours. Leçons, repas, études, révisions dans la bibliothèque, le tout ponctué par quelques matchs de Quidditch de temps à autre. Oscar put se réjouir de participer à deux d'entre eux en tant que remplaçant malgré la mise à l'écart volontaire orchestrée par Marcus Flint. En effet, un des trois poursuiveurs titulaires de Serpentard fut immobilisé un mois à la suite d'une chute de balai lui infligeant plusieurs ecchymoses lourdes et deux côtes cassées.
Étrangement, le dispositif ministériel de vigilance accrue après l'attentat du Festival de Pré-au-Lard se désengorgea presque une semaine après le jour du drame. Officiellement, les Aurors avaient été déployés soi-disant en dehors du château pour ne pas interférer avec la tenue des cours et des activités à Poudlard. Mais très rapidement, Winter, Oscar et tous les autres étudiants avaient vite remarqué lors de leurs sorties dans les plaines de l'école, en lisière de forêt, ou au bord du Lac Noir, qu'aucun agent du Ministère n'était présent.
Pour Oscar et sa logique administrative et stratégique, c'était une réduction des coûts non assumée par le Département de la justice magique. Mettre un château sous surveillance sans arrêt avait un impact non négligeable dans la trésorerie du gouvernement. Mais pour d'autres, c'était aussi une forme de déni de la part de Cornélius Fudge et d'Amelia Bones, la directrice de ce département, à la tête des Aurors. Finalement, le seul représentant présent encore régulièrement dans l'enceinte de l'école était Barty Croupton, nommé à la coopération magique internationale, qui était pris dans l'organisation de la dernière épreuve du Tournoi des Trois Sorciers. Mais ces derniers temps, le magistrat tentait en vain de rassurer et de recoller les pots cassés, assailli par les reproches de Madame Maxime et d'Igor Karkaroff qui doutaient de plus en plus de la sûreté intérieure de la Grande Bretagne.
À plusieurs reprises, les délégations bulgares et françaises menacèrent de quitter le sol écossais, notamment la France qui était désormais éliminée par la défaite de Fleur Delacour à la deuxième épreuve. Cela se joua à chaque fois à une parole bien placée de Dumbledore et sa diplomatie légendaire ou à quelques promesses en carton formulées par Barty Croupton.
Le climat à Poudlard devint donc un champ électromagnétique instable où les choses se déroulaient normalement en apparence, mais où tout menaçait de dégénérer à la moindre friction.
Au milieu de ces tensions invisibles, Winter alternait entre ses devoirs à faire, sa composition musicale de temps en temps dans la Salle sur Demande, et des créneaux d'entraînement pour répéter le sort Oculumbra en secret dans la salle du Club de Duel en dehors des horaires officiels d'ouverture. La jeune femme trouvait toujours la pièce ouverte, preuve discrète que Rogue suivait ses progrès avec attention.
Mais l'homme, lui, malgré sa promesse envers elle, n'était jamais disponible. Winter devina en entendant les professeurs McGonagall et Chourave échanger dans un couloir que le corps enseignant était ces derniers temps systématiquement convoqué en réunion presque tous les soirs. Même Filius Flitwick, qui avait toujours une énergie vive et pétillante, semblait plus cerné et moins prompt à échanger sur la musique avec la talentueuse rockstar à la fin des cours de sortilèges.
Quelque chose se tramait, mais Winter ne parvint à identifier précisément quoi. Et même si parfois, en cours de potion ou dans la Grande Salle lors des repas, le regard de Severus Rogue, incandescent et pénétrant, s'attardait longuement sur elle quand il voyait que personne ne le regardait, Winter commença à ressentir un manque, une absence brutale venant atténuer son sentiment d'espoir. La jeune femme n'avait que ces échanges silencieux, momentanés avec lui auxquels se raccrocher pour se convaincre qu'elle n'avait pas, une fois de plus, rêvé.
Un vendredi soir marquant les derniers jours du mois de Mai, Winter et Oscar sortaient d'un cours de Défense contre les forces du Mal avec le professeur Alastor Maugrey. La sorcière souffla bruyamment :
« - Cette matière, je n'en peux plus vraiment. J'en ai ma claque. »
Oscar, encore en train de ranger son manuel dans son sac, lui emboîtait le pas dans le couloir.
« - Pourtant, elle te plaisait au début, non ? ...C'est Maugrey, c'est ça ? »
La pianiste fulmina.
« - Mais ce type est complètement maboul ! Franchement, à quel moment Dumbledore s'est dit « oh, tiens, et si j'engageais un psychopathe alcolo avec un œil qui part en couille comme enseignant pour des adolescents » ? »
Le Serpentard secoua la tête.
« - Il est un peu spécial, c'est sûr, mais on apprend quand même des choses avec lui. Et puis, je ne vois pas pourquoi tu t'offenses pour...attends, comment ça s'appelle cette bestiole ?
- Un amblypyge ! », le coupa Winter ulcérée, « La pauvre bête, il l'a torturée comme un vulgaire jouet ! »
Oscar soupira. Malgré son attachement profond pour la jeune femme, il ne comprenait pas sa compassion envers l'étrange arachnide ayant servi de cobaye pour des sorts d'attaque violents devant toute la classe.
« - Mais...c'est hyper primitif comme animal, il n'a pas dû sentir grand-chose non ? Et puis...Maugrey a dit que sa morsure est mortelle et que c'est probablement un nuisible.
- C'est faux ! Il raconte n'importe quoi ! Ce n'est même pas venimeux, pas même magique et c'est très rare en Europe, ça ne vit pas ici. Il vient probablement d'un trafic illégal ! »
Le jeune homme ébouriffa ses touffes brunes de sa main, perplexe.
« - Attends, tu t'y connais en biologie animale maintenant ? Depuis quand ? »
Winter ne répondit pas. Elle ne pouvait pas lui dire qu'elle avait avec son pouvoir entendu la créature hurler de douleur, et qu'elle l'avait comprise. Les crissements perçants de l'amblypyge étaient pour elle des mots. Des phrases simples et peu élaborées dignes d'un cerveau modeste n'ayant pas évolué depuis 300 millions d'année, mais des fragments de ressentis et de pensées malgré tout bien réels.
La pianiste se calma lentement, la colère remplacée par de la peine. Elle n'avait jamais toléré la souffrance animale, mais le fait de l'entendre verbalisée contrairement aux autres la rendait encore plus insupportable et déchirante. Elle lâcha simplement avec un rire sans joie.
« - De toute façon, il n'y a pas d'intérêt de débattre, il est mort. Ce gros pochtron de Maugrey l'a tué. »
Oscar la détailla un moment de ses pupilles noisette. Même s'il ne comprenait pas la réaction, il était profondément contrarié que Winter se sente aussi mal. Il tenta de lui redonner le sourire.
« - Tu dis ça parce qu'il vide une fiole par cours et que son armoire doit être rempli de flacons ? Pourtant, il ne paraît pas si ivre malgré tout. »
Winter haussa les épaules, peu réceptive au rire. Elle répondit d'un ton franc et un peu revêche.
« - Pourtant, ça doit être du Whiskey pur feu qu'il s'enfile à longueur de journée, non ? Que voudrais-tu que ce soit d'autre ? »
Les deux amis étaient presque arrivés à la bibliothèque quand soudain un grand-duc au plumage noir de jais et aux aigrettes pointues survola le corridor du premier étage et lâcha en plein vol dans les mains de Winter une enveloppe sombre sur laquelle il n'y avait ni destinataire, ni expéditeur. L'oiseau disparut aussitôt, faisant lever quelques têtes de Serdaigles et de Gryffondors surpris à son passage.
Oscar fronça les sourcils et demanda, une pointe de méfiance dans la voix :
« - Tu reçois des lettres mystérieuses maintenant ? »
Winter demeura un moment muette, ses yeux bleus figés sur l'objet entre ses doigts.
« - Je...je ne sais pas. Je n'attendais rien... »
Mais déjà dans sa cage thoracique, son cœur se mit à battre plus fort. Le courrier était signé, de la couleur même du papier vergé de l'enveloppe...jusqu'à celle du hibou. Le jeune homme, voyant la non-réponse de l'élégante musicienne, demanda sur un ton presque légèrement insécure masqué par un semblant d'humour :
« - C'est un de tes plus grands fans, c'est ça ? »
La sorcière secoua la tête, un peu désabusée avec un air faussement détaché, alors qu'elle rangeait la lettre dans la couture intérieure de la robe de son uniforme, juste contre sa poitrine.
« - Tu as beaucoup d'imagination, Oscar. »
Elle afficha un faible sourire, son expression maussade se dissipant un peu alors que l'excitation intérieure montait. Et fidèle à son habitude de garder sa vie privée hors des radars, la compositrice ne fournit guère plus d'explications sur la séquence qui venait de se produire.
Le temps des révisions à la bibliothèque fut interminable. Elle profita au bout d'une heure du prétexte de devoir faire des recherches sur la culture du dictame pour le prochain cours de botanique afin de s'isoler entre deux étagères loin des regards d'Oscar ou de Madame Pince, la documentaliste. Elle frissonna quand cela lui rappela le point de rupture et de transgression avec Rogue dans la Réserve, là où tout avait basculé. Mais cette fois, la grille de la Réserve était bien refermée avec un cadenas enchanté -précaution ordonnée par McGonagall sans nul doute-.
Enfin seule, elle ressortit l'enveloppe, l'ouvrit et trouva simplement un petit mot rectangulaire orné d'une écriture fine, nette et élégante qu'elle n'avait vue auparavant que sur des devoirs de potions annotés. Chaque lettre avait été réalisée d'un tracé droit avec une précision chirurgicale. Winter retint sa respiration sans s'en rendre compte et elle lut :
Rejoignez-moi à minuit à l'entrée des sanitaires. Tour est, deuxième étage. Rusard patrouillera à l'Ouest. Soyez discrète.
S. R.
Après cela, le reste de la soirée parut insignifiant et beaucoup trop lent au goût de Winter. Elle ne se souvint même pas du menu du dîner, ni des sujets de conversations échangées avec Oscar et les rares Serpentards qui lui adressaient un peu la parole. Elle n'entendit guère les railleries méchantes et les insultes de Drago Malefoy et de Marcus Crux qui résonnaient à quelques bancs de là , telles un vulgaire bruit de fond, un léger larsen en concert qui agace sur le moment mais qu'on oublie l'instant d'après.
Minuit. Winter était prête. Elle n'en était plus à une excursion près mais cette, fois elle ne redoutait pas de tomber sur Severus Rogue. Elle allait le retrouver. Alors qu'elle se mit en chemin à pas de loup depuis le dortoir, son esprit carbura, se posant mille et une question. Allait-il être encore chaleureux avec elle ? Le lieu ne laissait clairement pas présager un rendez-vous galant. Winter s'était souvenue qu'Harry Potter, quelques mois auparavant, avait mentionné des toilettes au deuxième étage quand il avait parlé de son combat contre le basilic.
Lorsqu'elle arriva devant les sanitaires des filles de la tour est, la porte en bois peint et écaillé, d'ordinaire toujours condamnée, était grande ouverte. Un bruit d'eau s'écoulant en continu se réverbérait dans les canalisations blanches. Winter entra timidement, s'éclairant faiblement de sa baguette. De ce lieu se dégageait à la fois une odeur rance de renfermé, ainsi qu'une atmosphère sinistre, comme s'il était habité. Elle esquiva plusieurs flaques au sol avant de se rapprocher devant des lavabos en céramique massifs, alignés circulairement les uns à côté des autres de manière à former une sorte de rotonde.
Winter murmura timidement de peur de troubler le calme apparent et inquiétant dans la pièce :
« -...Il y a quelqu'un ? »
Pas de réponse. Winter n'entendit que ses pas émettre des bruits métalliques alors qu'elle marchait sur les plaques d'égouts. Elle s'adossa sur l'un des lavabos et attendit. Sa main vint frotter son avant-bras. Il faisait anormalement froid dans ces toilettes pour un printemps pourtant généreux, comme si de l'air glacé remontait du sol par les feintes entre les conduites. La jeune femme avait gardé son uniforme de Serpentard, désireuse de ne pas salir ses costumes favoris, mais elle se rendit rapidement à l'évidence qu'elle aurait dû prévoir une robe de sorcière plus chaude.
Au bout d'un moment, des bruit de semelles raides de souliers en cuir retentirent. Winter le vit apparaître dans l'encadrure de la porte. Severus Rogue.
Il s'interrompit un instant en la détaillant, assise de manière féminine et élégante sur un lieu poussiéreux et humide qui ne la méritait absolument pas. Le contraste était saisissant.
« - Winter. », souffla-t-il de sa voix grave, comme s'il avait retenu ce mot pendant des jours et qu'il en contenait mille autres qu'il ne parvenait pas à formuler.
Il s'avança lentement, sa cape dansant par-dessus son manteau, alors que la jeune femme se relevait doucement. Ce que Winter lut à la faible lumière de sa baguette dans les yeux de l'homme était un condensé de crainte alimentée par l'interdit, de retenue, mais aussi d'attente.
Elle s'approcha et d'un air cérémonieux, Severus Rogue l'attira contre lui, avec la grâce et la tension de quelqu'un qui ne comprenait pas comment il pouvait avoir accès à une telle créature et en même temps la peur omniprésente du rejet. Voyant qu'elle ne le repoussait pas, il s'autorisa à respirer profondément, sentant sa tête contre son torse.
Winter posa ses mains sur la taille mince et osseuse de l'alchimiste, toujours dissimulée derrière son armure en tissu. Mais elle pouvait à présent la deviner, la sentir. Il déposa son menton sur le haut de sa chevelure, s'autorisant à goûter l'espace d'un instant à une douce rupture avec sa solitude éternelle.
Puis, au bout d'un moment, Severus se retira doucement. Tout en lui luttait pour la garder dans ses bras pour entretenir cette sensation nouvelle et dangereusement addictive. Mais il avait un plan précis en tête. Il inspira, lisant la surprise sur le visage de Winter occasionnée par ce recul, et déclara lentement :
« - Vous êtes prête. »
Il laissa les mots s'évanouir jusqu'au fond des tuyauteries et poursuivit :
« - Je n'ai jamais cessé de suivre vos progrès. »
Il rajouta d'une voix plus douce teintée de regrets :
« - ...Ni de me débattre contre l'attente de vous retrouver. »
Winter sentit une chaleur douce irradier ses joues à ces mots. Elle le suivit du regard avec un mélange de désir, une envie de retourner dans ses bras, et en même temps de l'intrigue. Severus effectua le tour des lavabos, les scrutant avec intérêt, jusqu'à s'arrêter devant l'un d'entre eux. Sa main à moitié recouverte par sa manche se déposa sur le corps du robinet, recouvert de veines blanchâtres de calcaires et rongé par les moisissures et le temps. De son pouce, il caressa lentement la gravure d'un minuscule serpent sur celui-ci, semblable à celui du blason de Serpentard.
« - L'entrée de la Chambre des Secrets devrait se trouver...ici. »
Winter s'approcha, à la fois fascinée et décontenancée.
« - Comment ça ? Je ne vais pas réduire ma taille et y plonger tête la première, non ? »
Le professeur des potions laissa échapper un petit souffle qui ressemblait de loin à un début de rire moqueur, mais étonnamment tendre en même temps.
« - Non, Winter, croyez-moi, prophétie ou non, je doute que finir noyée dans un lavabo soit une destinée digne de vous. »
Il s'écarta légèrement pour la laisser accéder. D'un ton un plus sérieux et mesuré, il déclara :
« - C'est par le Fourchelangue que le passage devrait s'ouvrir. »
Winter resta silencieuse un moment, concentrée. Elle ne s'était jamais encore adressée à un serpent. Severus se tint en retrait, les bras croisés mais crispés, trahissant une certaine nervosité malgré son visage impassible. Ses doigts, aussi pâles que la céramique du lavabo, s'enfonçaient dans le tissu de ses manches de manteau.
La jeune femme fixa le serpent gravé en imaginant qu'il en était réellement un. Elle fit le vide en elle et déclara d'une voix douce, instinctivement sifflante et assurée :
« - Ouvre-toi. »
Aussitôt, la rotonde se mit à trembler, créant une vibration sourde au niveau de la grille sous les pieds de Winter. Cette dernière recula par réflexe. Des jonctions de lavabos se disloquèrent et se réarrangèrent, certaines lévitant dans l'air, de sorte que l'évier face à Winter recula. Sous lui se dévoila une conduite -non-, un trou béant sans fond s'engouffrant vers les profondeurs du château.
La musicienne, pourtant maintenant plus accoutumée au monde magique, n'avait jamais rien vu de tel. Elle se pencha et aussitôt qu'elle émit un son, il résonna en écho, dévoilant des mètres et des mètres de cavité.
« - C'est... »
Elle ne trouva pas les mots. Severus Rogue, lui s'était également approché, interdit même si c'était la première fois qu'il voyait l'ouverture de ses propres yeux. Il fixa l'entrée comme s'il venait de trouver un portail vers les enfers et ses yeux se détournèrent ensuite vers Winter avec un trouble à peine dissimulé. Tout en lui criait qu'il était folie de l'envoyer en bas.
La respiration lourde et la voix d'une grande gravité, le professeur des potions plongea ses yeux dans ceux de Winter.
« - Si jamais la moindre chose dégénère, fuyez. Ne jouez pas les héroïnes...je vous l'interdis. »
Ses iris noirs se dirigèrent ensuite vers la main de la musicienne et d'un geste presque révérencieux, il la prit dans la sienne.
« - J'attendrai ici. Revenez...intacte. »
Et avec lenteur, il approcha sa tête de Winter, le regard brûlant. Leurs fronts se touchèrent et leurs lèvres n'étaient plus qu'à quelques centimètres. Severus leva son autre main vers la nuque de la jeune femme et réduisit la distance. Quand soudain, une voix tonitruante espiègle et enfantine résonna comme si elle sortait d'entre les murs.
« - Ohhh Severuuuuuus ! Je t'ai vu ! Toi, le sinistre professeeeeur en train d'embrasser une élève ! Dans mes toilettes ! Oh là là , quelle horreeeeur ! C'est tellement...scandaleeeeux ! Et terriblement injuste, personne ne me regarde comme ça, moi ! Hiiiii ! »
Une forme blanche flottant surgit d'à travers les cloisons des toilettes, le fantôme d'une jeune fille portant un uniforme de Poudlard d'autrefois, des lunettes et des couettes. Elle avait quelque chose d'extrêmement juvénile et adolescent. Winter écarquilla de grands yeux.
« - Qu'est-ce que c'est que ça... ? », murmura-t-elle, se remettant de son sursaut.
Le spectre hurla d'un ton plaintif et théâtral comme si elle jouait une tragédie grecque.
« - ÇA ? ÇA ? Alors c'est ainsi qu'on m'appelle maintenant ? Parce que je suis morte, je ne compte plus, c'est ça ? Je ne suis même plus réelle à vos yeux ! Oooh, c'est toujours pareil... personne ne respecte jamais Mimi... »
Severus Rogue, agacé, les narines écartées trahissant un effort suprême de retenue, répondit à Winter :
« - Mimi Geignarde... Une élève insignifiante, braillarde au possible, qui a eu la malchance de croiser le Basilic lors de la première ouverture de la Chambre des Secrets. »
La demoiselle flottait à présent dans l'air tout près d'eux, jouant toujours plus avec les nerfs du Maître des Potions. Elle avait les mains sur les hanches et son corps vaporeux s'élevait toujours un peu plus haut alors qu'elle s'emportait en vexation.
« - Alors c'est comme ça que tu parles de moi Severuuus ? J'ai peut-être quatorze ans pour l'éternité...mais je suis née avant toi ! C'est drôle, noooon ? »
Elle s'approcha de lui avec une expression mélodramatique :
« - Je pensais que nous étions pareils, tu saiiiis... Mal aimés, ignorés, transparents aux yeux des autres. Mais noooon ! Toi qui fais toujours le rigiiiide, te voilà en train de transgresser les règles... et avec une élève très belle, en plus ! »
Cette fois-ci, la patience du faiseur de potions atteignit sa limite. D'un geste élégant, ferme et précis de baguette, il lança d'une voix sèche :
« - Oubliettes. Repulso. »
Le premier sort, ayant un effet sur l'âme et non sur le corps, frappa la silhouette fantomatique de Mimi Geignarde qui sembla soudainement déboussolée, le regard vitreux et blanc pendant l'espace d'un instant. Le deuxième la traversa et provoqua un bruit de fracas en percutant un mur de plein fouet, endommageant un carreau en faïence au passage.
Le fantôme prit peur et s'envola aussitôt en poussant un « hiiiiiiiii » strident avant de disparaître au fond d'une cuvette de toilettes, provoquant un débordement d'eau croupie au passage.
Winter, stupéfaite, se retourna vers Severus Rogue. Le sortilège Oubliettes effaçait la mémoire sélectivement. Elle ne le maîtrisait évidemment pas mais surtout, elle le savait extrêmement réglementé. Elle l'interrogea du regard. Il répondit simplement d'une voix calme avec une pointe d'ironie :
« - La loi ne s'est jamais souciée des revenants. »
Il se rapprocha de Winter à nouveau et murmura d'une voix basse et traînante :
« - Je ne laisserai personne nous interrompre...pas cette fois. »
Il l'embrassa pleinement. Plus rien ne compta pendant ces quelques secondes et les mouvements, les caresses furent empli d'une forme d'urgence, celle qui précédait les épisodes où tout pouvait basculer.
Puis, enfin, Winter se rapprocha du tunnel. Un frisson de vertige la saisit. Et elle plongea.

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