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Jenquet: l'Antihéros

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LE TEMPS PASSE

Immersion québécoise

Dur réveil sans réveille-matin en ce frisquet matin d'automne. Luis, en quittant le Venezuela en toute hâte, ne pensait pas au temps froid qui l'attendait au Québec. S'installer à St-Jean-D'Épîles exige un minimum d'effets personnels et son garde-manger a faim de nourriture. Son ami Mauricio aurait pu l'aider dans sa quête mais il fait la grasse matinée. Se fiant à son instinct, Luis quitte sa chambre vers 10 h 18, heure approximative puisqu'il doit se procurer un réveille-matin. Il passe devant la chambre de Jenquet d'où proviennent des gémissements de plaisirs sexuels. Chiquita doit s'y trouver ! Il descend au rez-de-chaussée et aperçoit Vénus s'apprêtant à épiler Rita Baga, célèbre Drag Queen québécoise qu'il ne connaît pas encore mais qui lui plaît déjà. Un premier pas sur un trottoir mouillé amène son postérieur à visiter le sol québécois. Un juron bien vénézuélien sort de sa bouche. Il jurera bientôt en québécois. Son coco récemment rasé par Chiquita attire les bourrasques de vent alimentées par les érables argentés se débarrassant de leurs feuilles rougeâtres. Apercevant le magasin général, il s'y engouffre. Des achats urgents l'attendent. Un réveille-matin trône dans son panier, suivi d'une casquette pour cacher sa calvitie, un imper, des bas chauds et des slips aguichants pour de futures rencontres privées. Il ne faut pas s'en priver. Naturellement, des condoms couleur rose bonbon s'imposent. Arrivé à la caisse, ses yeux sont attirés par un objet insolite : une figurine opaline à l'effigie de Jenquet. Luis demande au caissier d'expliquer les raisons de la notoriété de ce vieux retraité. Le jeune homme épilogue pendant 10 minutes sur les exploits de Jenquet. Luis est estomaqué. L'objet ne fait pas partie de sa liste d'achats mais il ne peut résister à en faire l'acquisition. Puis, il se rend dans la section épicerie. Café, lait, œufs, tomates et laitue prennent le chemin du panier. Ils sont rejoints par une truite et un saumon fiers représentants de la famille des carnassiers. Naturellement le tout est complété par deux bouteilles de rouge. Une surprise l'attend quand vient le temps de payer. Première constatation importante : les magasins québécois n'acceptent pas les bolivars. Deuxièmement, un bolivar ne vaut que 0 , 03 $. La richesse de Luis vient de fondre au soleil même en cette journée pluvieuse. Le retour à la maison n'annonce rien de bon. Il lui faudra trouver du travail.

Traversant la rue principale, Luis aperçoit son reflet dans la vitrine de La librairie des Chats Noirs. Sans hésitation, il en pousse la porte qui ne s'ouvre pas. Au Québec, il faut les tirer si on veut pénétrer à l'intérieur. Il aimerait se procurer un dictionnaire espagnol-français. Surprise ! La libraire n'est nulle autre que Rita Baga. Fraîchement épilée, iel accueille Luis avec un grand sourire invitant. Vénus lui a raconté l'arrivée de cet éphèbe vénézuélien. Une matinée qui prend une toute nouvelle tournure. Les achats coquins de Luis vont servir d'apéro à cette rencontre imprévue. Paul Éluard aurait sûrement dit qu'il n’y a pas de hasards, il n’y a que des rendez-vous.

De mémoire

Le journal La Dépêche poursuit sa mission de mettre l'accent sur la vérité et quoi de mieux que d'offrir à ses lecteurs de nouvelles chroniques relatant les souvenirs véridiques ou non choisis par le célèbre ex-détective Jenquet. Ce dernier consent à dévoiler les dessous de ses brillantes aventures gisant sur les tablettes de sa bibliothèque. Une entrevue avec Hermès se déroule au Repère, un rituel qui se répète hebdomadairement.

Jenquet, un sac magique sur son genou arthrosé constate que ce sac synthétique n'est pas magique. En réalité, ce n'est même pas un sac. Mais toute vérité n'est pas bonne à dire. D'une franchise toute Trompeiste, Jenquet promet de dire la vérité, toute la vérité et rien que SA vérité.

Pas question de contes à dormir debout. Il va rendre compte de ses aventures debout et de bout en bout. Pour se lever, Jenquet oblige le fauteuil à le libérer et s'évade des bras de ce dernier. À peine debout, il prend quelques instants de repos profitant de sa légendaire capacité à dormir debout. Il décide alors de faire ce qu'il accomplit le mieux : ne rien faire tout en se remémorant une de ses premières enquêtes qu'il aurait aimé résoudre.

En vérité, en vérité je vous le dis (ce qui sera repris par Jean dans une certaine Bible), cette enquête fut douloureuse. Je me revois menant la filature d'un jeune voyou insolent soupçonné de vol au moment où ce dernier emprunte illégalement une voiture à Marseille pour se rendre à Paris. Je le suis pas à pas ou km à km en vélo faisant attention à ne pas le dépasser vu qu'il est embouteillé dans une circulation particulièrement dense. Arrivé près de la bouche de métro Godard, il heurte à mort un policier qui, tant pis pour son âme, rendra l'âme à l'hôpital faute d'infirmières à l'urgence. Le voyou provocateur de frayeur s'engouffre dans le métro et je le poursuis. À bout de souffle, je le vois attendant la rame. C'est un grand blond avec une chaussette noire. Je sors mon pistolet pour l'arraisonner. Mon ombre m'imite, me prenant de vitesse. Ma demande au vaurien ne vaut rien. Je tire un coup de semonce au-dessus de sa tête de clown. Il prend peur et, suite à un arrêt cardiaque, s'effondre de travers sur les rails. Ce faisant, le courant électrique courant sur ces derniers réaniment son cœur qui, rentré au bercail, reprend ses battements réguliers permettant au voyou d'apercevoir pendant une fraction "probablement un tiers" la locomotive qui, en état de choc, le percute mortellement. Les policiers accourent. Au cours de ma déposition, je suis à court d'explications crédibles. Tout s'est déroulé rapidement. Suite à ma suggestion, les policiers concluent à un suicide involontaire.

L'article fera la Une de la troisième section du journal dédiée aux faits cocasses et non vérifiés. Voilà l'avantage d'avoir le rédacteur en chef comme ami et voisin de chambre.

Après un quart de siècle à s'occuper des problèmes de tierces personnes et de les résoudre à demi, Jenquet souhaite commencer à réussir sa vie. Les 25 prochaines années y seront consacrées, du moins s'il se rend à 106 ans.

Un peu d'esthétisme.

Le petit village de St-Jean-D'Épîles connaît une effervescence inattendue. Son ex-maire a dû démissionner suite à l'agitation populaire provoquée par un scandale sexuel le touchant. Le compte-rendu de son procès s'étale à la UNE de La Dépêche. Sous le clavier d'Hermès, on raconte les demandes très particulières du maire qui exigeait de la jeune prostituée Vénus qu'elle lui lise le roman de Max Gallo : Le Peuple et Le Roi pendant qu'il copulait avec la reine du porno de La Poule Mouillée. Adepte de Donald Trompe, il rêvait de se maintenir au pouvoir indéfiniment en éloignant toute opposition. D'autres accusations, dont on ne peut prévoir les impacts, accablent l'ex-magistrat. Il aurait tenté de soudoyer la jeune prostituée en lui offrant 10 000 euros puisés à même les fonds de sa campagne électorale et a menacé le bordel de fermeture. Le jugement devrait être prononcé dans les mois qui viennent. M. Lemaire demande à ses supporters de l'appuyer par des dons monétaires en vue d'une prochaine campagne puisqu'il crie à tout vent qu'il va se représenter et se venger de ses adversaires.

Le Québec a connu une révolution tranquille en 1960 et une révolution sexuelle en 1970. Il se débarrasse lentement de ses curés pédophiles et les femmes sont considérées à l'égale des hommes. Comment peut-on croire qu'un maire puisse porter Trompe aux nues quand il est nu ? Revenir aux années 50 serait révolutionnaire.

Ancestry

En plein milieu d'un dîner de cons avec un ex-maire de moins en moins coquin, mon cellulaire m'annonce que j'ai un appel. Une richissime veuve veut retrouver les parents de sa compagne Caroline, une batracienne bien-aimée. Selon la dame, la mère de Caroline vivrait toujours en Guadeloupe sous le nom de Gaia. Ce renseignement crucial provient d'une recherche d'ADN effectuée par le site Ancestry parmi les gens qui ont un air de famille. J'accepte sa requête vu qu'elle se déroule en Guadeloupe, toutes dépenses payées.

Chiquita vient me conduire à l'aéroport tout en s'assurant que j'ai mon passeport et mon billet. Depuis peu, j'ai des objets qui se cachent à ma vue. Je m'envole. En vol, je profite de plusieurs heures de liberté pour me remémorer mes notions d'espagnol. Pas question d'être pris au dépourvu. Je "désavionne" à l'aéroport de Pointe à Pitre. Je fais un pitre de moi-même en m'adressant au douanier en espagnol. Ici, tous communiquent dans un français incompréhensible pour un Québécois. Je réussis à noliser un chauffeur de taxi vu que j'avais loupé le dernier métro. Je lui donne l'adresse de la plage de Malendure. Il me dit qu'on a 35 minutes de route en passant par le parc de la Retraite. Je lui dis que je suis déjà à la retraite. Il propose un arrêt au parc des Mamelles. J'acquiesce. Un arrêt inutile, aucune femme ne s'y promène les mamelles à l'air. On arrive finalement à la plage de Malendure. Une pancarte bien en évidence : "Ne dérangez pas Gaia". Eureka ! J'ai trouvé la maman. Mais la pancarte se trouve sur la rive opposée de la rivière. Dix mètres m'en séparent. Trois mètres de profondeur refroidissent mes ardeurs. Je dois me rendre sur la rive opposée. Je marche à l'ombre de joncs géants. Si j'étais Jésus, il me suffirait de marcher sur les eaux. N'étant que moi, j'utilise le petit pont qui enjambe le cours d'eau. Mes yeux oublient les cataractes qui s'entêtent à brouiller leur vue et aperçoivent la maman recherchée qui trottine à pas de tortue vers la rivière. Mes pas emboîtent les siens. Gaia, est-ce bien toi ? Elle me regarde ne sachant si elle doit me répondre. Se croyant attaquée elle se réfugie sous une grande carapace de silence. Je lui demande si elle avait perdu la boule en confiant son enfant à la mère de Bill. Elle me répond qu'elle abandonne toujours les enfants qu'elle pond. Deux cents œufs par accouchement et cela sept fois par année. Impossible d'en reconnaître la maternité. Un gardien me sermonne. Défendu de déranger Gaia, la plus vieille tortue Caouanne de l'Île. Gaia n'est donc pas la mère de Caroline. Une tortue marine ne peut engendrer une tortue de terre.

Je retrouve mon taxi et son chauffeur et on retourne directement à l'aéroport. Une course totale de 220 euros. L'avion me ramène au Québec et Chiquita à St-Jean-D'Épîles.

Pas besoin d'être un prophète pour annoncer qu'Ancestry ne fonctionne pas bien et qu'il ne promet que des moulins à vent. Se pourrait-il que les renseignements d'ADN recueillis soient revendus à des compagnies d'assurance pour connaître l'état de santé des futurs bénéficiaires ou à des employeurs pour avoir le bilan de santé des gens qu'elles vont engager ? Il faudrait que je me penche là-dessus. Mais pour l'instant, je me penche au-dessus de ma chère Chiquita. À mon âge vénérable de 81 chandelles, je me dois de ralentir mes activités sexuelles. Chiquita est bien patiente avec moi. Un baiser et une légère fessée sur son postérieur la rend joyeuse. Une paraphilie qu'elle adore.

Ă€ l'eau !

Après une nuit d'amour torride sans Chiquita, mes rêves se révèlent un cauchemar. Il me semble avoir entendu du bruit dans mon antre. Je jette un regard au pied de mon lit et aux miens en quête d'un intrus. Personne. Une visite à la salle de bain sans bain m'apprend qu'il n'y a aucun visiteur. J'ai dû rêver ou le visiteur s'est dérobé. L'absence d'un arôme de café me suggère de m'en préparer une tasse qui comblera ma soif d'aventures. Il m'accompagne jusqu'à mon ordinateur qui trépigne d'impatience de m'annoncer toutes les mauvaises nouvelles de la nuit : Trompe se prépare à détruire son pays, la pluie l'a déjà fait à Valence, Poutine et Netanyahou continuent de jouer à la guerre. Vivre au Québec c'est Bysance !

Mes yeux sont attirés par un mémo gisant sur mon bureau. Une note signée par Hocquet. Mon sens inné de déduction en déduit qu'il fut à l'origine des bruits entendus pendant mon sommeil. Sa nomination au poste de rédacteur en chef de La Dépêche n'a aucunement amélioré sa calligraphie. Mes cataractes n'aident pas au déchiffrement du message qui se lit comme suit :"N'oublie pas de te rendre à La Réunion le 4 décembre pour préparer la fête de Joëlle." Pas question de bretter. Aller à la Réunion demande toute une préparation et pas de laisser-aller.

Pas question de revivre le cauchemar de mon voyage en Guadeloupe. Je m'informe si je dois y parler espagnol. Nenni. Le français est de mise. Mais lequel ? J'espère que mon accent n'écorchera pas leurs zoreilles. Il faudra aussi que je me trouve un bon hôtel si je veux être sur le piton pendant mon séjour.

Les Joëlle ne pullulent pas à La Réunion. Connaissant Hocquet, il doit sûrement s'intéresser à une personnalité littéraire connue internationalement afin d'en parler dans La Dépêche. Je me souviens que la semaine dernière, il m'a parlé de sa participation à un concours littéraire où il a terminé parmi les 55 non-finalistes. Il cherche sûrement une autrice qui performe mieux que lui. Google m'apprend qu'une certaine Joëlle s'est méritée une soixantaine de prix littéraires. De quoi rendre Hocquet jaloux. C'est probablement elle qu'il veut honorer et fêter. Je suis honoré qu'il fasse appel à mes services pour aller la rencontrer.

Je demanderai à Chiquita de m'accompagner. Je me rends au Raseur Rasé où mon amie est en plein travail de repos en l'absence de clients. Je lui parle du voyage proposé par Hocquet. La perplexité se lit dans son visage. Elle souhaite lire le mémo. Je le lui montre. Une lecture rapide amène ses yeux de la feuille à mes yeux. Elle l'a lu sous un angle différent du mien. Un éclat de rire surgit de sa gorge déployée. Je perçois de l'ironie à mon égard. Son regard luisant le confirme. Elle m'apprend que nous ne partirons pas en voyage. Je l'apostrophe avec véhémence. Pourquoi veut-elle me retenir au Québec ? Elle m'explique gentiment que Hocquet m'a demandé de me rendre à une réunion le 4 décembre pour préparer la fête de Noël. Un projet de voyage qui tombe à l'eau.

La menace

Pendant une nuit polaire, le téléphone sans fil qui repose sur la table de cuisine, reçoit quatre messages qui n'osent me réveiller. La nuit, il ne nuit pas à mon sommeil étant en fonction "Ne pas déranger". Une fonctionnalité qui me fait épargner 1 dollar par jour. Pas de quoi fouetter un chat mais sur un siècle, je vais épargner près de 37 000 dollars. Dès que je mets les pieds hors du lit, mes jambes suivent et me conduisent devant le frigo en vue d'un petit déjeuner copieux. Mes papilles anticipent des oeufs brouillés parsemés de bacon accompagnés d'un bon latté. J'ouvre la porte. Ma vue se brouille. Qui a vampirisé le froid de mon frigo ? Pas de lumière ni de fraîcheur. La brique de beurre n'est plus qu'un magma informe. Les ailes de poulet dépérissent. Mon frigo a rendu l'âme sans me prévenir. Je dois donc me contenter de quelques noix pour me sustenter.

Sirotant un latté sans lait, mes yeux sont attirés vers le téléphone qui, tel une sirène, me fait de l'œil pour que je le prenne en mains. Je succombe à son appel et constate qu'il recèle 4 appels et 5 textos. J'écoute les premiers et lis les seconds. Ils viennent tous de la même personne et se résument ainsi : TU VAS MOURIR. Sur une échelle de 10, je dirais que ma journée commence sur une mauvaise note.

C'est la première fois en 25 ans de retraite consacrés à quelques enquêtes que je suis victime de menaces. Dois-je sérieusement la prendre au sérieux ? Je fais le tour de tous les criminels que j'ai envoyés en prison. Il n'y en a aucun.

Qui m'en veut ? Une de mes quatre femmes ? Impossible. La première est complètement perdue grâce à l'Alzheimer. La deuxième vit en Italie profitant de ma pension. Elle ne veut sûrement pas la perdre en me perdant. La troisième m'aime encore et la dernière m'a quitté, toute heureuse de le faire.

Le soir venu, on sonne à la porte. Ne prenant aucune chance, je m'arme d'un couteau et l'ouvre prudemment. Ils sont cinq devant moi, masqués et pointant leur petit panier. Ils veulent voler MES bonbons. J'avais oublié que c'était l'Halloween. Trois visites plus tard, n'ayant plus de friandises ni de précautions à prendre, j'ouvre sans méfiance. Un grand noir aux dents blanches me salue. Je reconnais Luis, cet immigrant illégal récemment arrivé à St-Jean-D'Épîles après avoir occis sa génitrice. Il s'excuse de sa visite tardive. Il me tend un téléphone en disant qu'il avait interchangé le sien avec le mien ou vice-versa. Guillaume Musso reprendra un tel imbroglio dans L'Appel de L'Ange.

La menace ne m'était donc pas adressée. Je dis à Luis de faire attention à lui et de vérifier les menaces qui lui sont destinées et surtout de mettre un mot de passe difficile à pianoter afin d'empêcher quiconque de lire ses courriels. Je lui propose le 169anna961 qu'il devra lire à l'envers.

À quoi ça rime ?

Chez moi, tradition oblige, les étrennes arrivent après Noël. Plus de sapin qui ferait trop la joie de mes chats. Pas de décorations pour faire croire à la joie. Trop de mauvais souvenirs. Quatre Saint-Sylvestre où j'ai dû annoncer à mes proches que je me séparais de ma conjointe ou elle de moi. Un rituel aux 10 ans. Le mariage est toujours un risque, mais la routine est mortelle du moins pour les couples de mortels. Je veille donc, ce soir, en compagnie de mes amis. Chiquita me remet en tremblant une carte de vœux. J'ouvre et je lis à haute voix :

Loin de moi vouloir briser ton cœur

Avec ces quelques mots sans ambages

Pour toi, mon ami, qui a pris de l'âge

Dorénavant nous vivrons comme frère et sœur.

Aucun baiser n'accompagne ce message. Elle n'a embrassé que ses rimes sans user le vermillon de ses lèvres si douces. Bonsoir tristesse.

Pourtant, j'ai investi beaucoup dans cette relation. Pendant 15 ans, j'ai aidé Chiquita à maintenir son bordel à flot à coup de 200 $ par semaine : un coût énorme pour un petit coup rapide. Je n'ose faire le calcul de mon investissement qui dépasse sûrement les 156 000 dollars. Des dépenses qui auraient pu me conduire à la ruine. Puis les années suivantes, toutes ces heures d'amitié à la soutenir et à accepter ses coupes calvitie. Elle souhaite que nous demeurions amis. Comme elle habite toujours la chambre face à la mienne, qu'elle ne se figure que je vais détourner la figure quand on se fait face : elle se trompe. Et puis, j'ai besoin d'elle comme conseillère et conductrice depuis que ma vue me quitte graduellement. Cette semaine, mon amie partage son lit et son corps avec Luis, ce Vénézuélien qui vient de rentrer dans le placard et dans sa chambre. Finie la gaieté, il préfère maintenant une ex-fille de joie ! Cela ne me rend pas jaloux mais certes un peu plus raciste. Je le sais, je broie du noir. Je n'ai aucune idée comment elle peut faire l'amour avec un noir sans se fatiguer. Il faudrait que je demande à un Immortel de m'en donner secrètement le secret.

Je viens de comprendre pourquoi Vénus n'ose pas me regarder dans les yeux. Distraite, elle cherche des bonbons dans une bouteille d'aspirines au lieu de la bonbonnière. Elle connaissait le contenu de la carte. Pendant ce temps, Hocquet et Hermès dirigent leurs les quatre yeux sur leur cellulaire et semblent divisés quant à l'avenir du Premier Ministre canadien. Pourtant ils ne s'étaient jamais intéressés à la politique.

Où retrouver une sexualité active ? Impossible à mon âge canonique de me remettre sur le marché des conquêtes amoureuses. En plus, dans mon village, il n'y a plus aucune femme de disponible. Cupidon ne m'est d'aucun secours. Il ne pourrait toucher le cœur d'une âme sœur même avec une arbalète. Je débute une vie plate et platonique. Il faut absolument que je me remette au travail.


Texte publié par Jenquet, 25 mai 2025
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