Chapitre 15 : Pièges
Deux mois après la rencontre de Fanel avec la caravane marchande, à quelques lieues de Striass.
— Fanel, comment ça se passe ? demanda Proka, l’un des marchands de la caravane.
— Rien à signaler à l’arrière, lui répondis-je, assis sur mon phororhacos.
— Reste vigilant, on ne sait jamais, ajouta-t-il avant de repartir vers l’avant.
Se déguiser en escorte de marchands avait été une sage décision. Durant ces deux mois, nous n’avions pas rencontré trop de problèmes. On nous avait même prêté des montures, ce qui nous permettait d’aller deux fois plus vite qu’à pied.
Bien sûr, ce n’étaient pas des mois de repos : nous avions diverses tâches, comme protéger contre les bêtes sauvages, assurer les quarts de nuit, ou escorter les convois militaires le long de la frontière.
Ă€ midi, la caravane fit halte.
— Rick, comment ça se passe à l’avant ? demandai-je en m’approchant de mon ami.
Durant ces deux mois, j’avais pu mieux le connaître, et j’appréciais son franc-parler.
— Pas trop mal. Cinnus m’exaspère avec sa fainéantise, mais il a un bon instinct et un flair remarquable.
— Tant mieux, répondis-je en souriant.
— D’ici deux jours, on devrait arriver à destination et quitter la caravane, me précisa-t-il.
— Je sais, on va traverser la montagne, c’est ça ?
— Oui, le mont Drasian. Il y a un large tunnel infesté de créatures. On dit qu’avant, c’était un donjon, mais une fois nettoyé, la guilde des chasseurs a été chargée de maintenir la sécurité et d’ouvrir un passage entre le duché et le royaume de Corvés. Cela dit, il reste quelques monstres dans ces cavernes, il faudra rester prudents.
— Oui, ce serait bien d’y arriver en un seul morceau, dit Cinnus, qui venait de se joindre à nous.
— Mais à ce rythme, je ne vais jamais rentrer chez moi voir mes magnifiques petites-filles, murmurai-je.
— Arrête de radoter, vieux ! me sermonna le Umas.
Nous rejoignîmes le feu de camp allumé par les marchands pour cuire la viande.
La journée passa. Le soir venu, comme à l’habitude, nous aidâmes à monter le camp. Je fus désigné pour le premier quart de garde.
La nuit tombée, je patrouillai autour du camp avec vigilance. Jusqu’à présent, aucune attaque majeure n’avait eu lieu de nuit, mais les marchands nous avaient avertis que la plupart des attaques sur les convois surviennent dans l’obscurité.
Les heures passèrent sans incident. Rick vint prendre la relève.
— Ça va ?
— Oui, pas de souci, répondis-je.
Mais soudain, un bruit parvint à mes oreilles. Je fis signe à Rick de se taire, puis disparus dans l’ombre pour explorer les environs. Process activa le scanner.
Sur la carte, derrière un petit bois d’arbres de sécheresse, des points rouges apparaissaient. Ces arbres, menus et élancés, poussaient sur sol mi-rocheux, captant la condensation nocturne pour survivre.
Derrière ce bois, une troupe était allongée, attendant en embuscade. Je reconnus immédiatement leur espèce.
Sans perdre un instant, je rejoignis Rick.
— Vite, réveille discrètement tout le monde, on va être attaqués.
— Par quoi ?
— Des orcs ! annonçai-je en serrant les dents.
Rick, comprenant la gravité, alerta calmement chaque tente. En quelques minutes, le camp était en alerte : les chasseurs et protecteurs en première ligne, les marchands se regroupant à l’arrière, prêts à se défendre.
— Fanel, c’est toi qui les as repérés ? demanda un homme grand, en armure sombre.
— Oui, chef mercenaire.
— Ils étaient derrière ce bois. J’ai pu m’approcher et repérer un escadron qui nous surveillait.
— Hum. Tu es sûr que c’étaient des orcs ?
— Oui, comme dans les rapports précédents.
— Ils doivent nous suivre depuis un moment… s’il y a un escadron entier, il doit y en avoir d’autres. Ils ont dû nous encercler.
— Espérons qu’ils fuiront comme la dernière fois, intervint un homme trapu au regard espiègle.
— Je ne crois pas, ils semblent prêts à combattre cette fois, répondit le chef.
— Préparez-vous au combat ! ordonna-t-il en rejoignant les mercenaires.
Au signal, des dizaines d’orcs armés de hachoirs et d’hallebardes surgirent des ombres, encerclant le camp.
Un silence assourdissant s’installa, seulement troublé par le crépitement du feu.
Nos regards se croisèrent avec ceux des orcs, lourds de défi.
Un orc leva son hallebarde en criant rauquement. L’assaut fut lancé.
De toutes parts, ils s’abattirent sur nous, masses musculaires et haches lourdes. Nous tentâmes de tenir la ligne face à cette furie.
Je sautai en arrière, dégainant mon amplificateur, tirant des étincelles, évitant d’utiliser mes pouvoirs les plus forts de peur de blesser mes alliés.
À chaque volée, un orc tombait, mais ils semblaient inépuisables.
Rick et Cinnus tenaient bon ensemble, tandis que le chef des mercenaires et quinze hommes frappaient fort. Pourtant, nous étions progressivement submergés.
L’encerclement se resserrait. L’espace pour combattre fondait, les pertes aussi. Je dus ranger mon arme à feu et sortir une dague.
— Putain d’orc ! cria un mercenaire en chargeant. Mais à quoi bon charger contre la mort ? Sa tête roula sur le sol, tranchée d’un coup fatal.
— On va s’en sortir ? murmura Cinnus, débordé.
— Fais chier ! grogna Rick, cherchant mon regard.
Je les regardai, songeant que tout pouvait finir lĂ .
Puis, soudain, des flèches sifflèrent à l’arrière. Un Rainevars sauta dans la mêlée, brandissant une hache tournoyante avec fureur. Des chants retentirent, et des sorts s’abattirent sur les orcs.
— Des renforts ! Profitons-en ! cria le chef des mercenaires en se lançant à l’assaut.
Les mercenaires, galvanisés, ripostèrent avec rage.
Je vis un guerrier humain et un autre Rainevars arriver. Flèches et sorts fusaient, certains orcs tombés se relevaient pour frapper leurs alliés.
J’en profitai pour reprendre mon arme à feu et tirer des étincelles.
En dix minutes, les orcs, désormais en infériorité numérique, se dispersèrent.
Je soufflai de soulagement, rejoignant Cinnus qui me fit signe.
— On l’a échappé belle, hein ?
— Oui, mais…
— Quoi ? demandai-je, intrigué.
— Ces gens, tu ne les reconnais pas ? demanda-t-il.
Je me retournai, regardant les deux Rainevars et le guerrier qui nous avaient sauvés.
Un archer sortit de l’ombre, ses cheveux bleus et grandes oreilles le rendaient distinct.
— C’est cet enfoiré ! C’est eux ! soufflai-je en serrant les dents.
Je savais qu’ils avaient sauvé tout le monde, mais aussi que c’était à cause d’eux que Matis était morte. Que ces derniers mois avaient été un enfer.
Mon regard s’enflamma. Je vis Piérick s’avancer vers le chef des mercenaires. Je remis ma capuche.
— Préparez-vous à fuir, murmurai-je.
Rick, portant Cinnus sur son épaule, se dirigea vers les montures.
J’en fis de même, galopant au maximum, ne retenant pas mes rênes.
— On fonce vers le mont Drasian ! cria Rick.
Derrière nous, la caravane sombrait dans le chaos.
Nous chevauchâmes trois heures sans pause avant de devoir ménager nos montures. Heureusement, elles avaient dormi une grande partie de la nuit.
— Il faut qu’on se prépare, annonçai-je.
— À quoi ? demanda le Umas.
— Nous allons leur tendre des pièges, puis les achever quand ils tomberont. Cette course-poursuite a assez duré, il est temps de mettre fin au jeu, dis-je en serrant les dents.
Rick et Cinnus ne répondirent pas, sans doute nourrissant eux aussi une haine profonde envers ces poursuivants.
~~~
Point de vue du groupe de Piérick.
Piérick remonta sur sa monture. Les membres de son groupe avaient rangé le camp.
— Allons-y !
— Tu es sûr qu’on les retrouvera au passage Naros du mont Drasian ? demanda Grog en montant sur son volatile.
— Où iraient-ils d’autre ? Les Rainevars veulent tuer humains et estrayants. Les humains les veulent aussi morts. Il n’y a pas de terre sûre, sauf peut-être le duché de Rustien, répondit Vector en haussant les épaules.
— De toute façon, c’est leur direction, autant aller voir, rétorqua Herbs.
— Oui, et avec notre groupe, on peut facilement avoir des infos à la guilde, ajouta Marie.
— En route, dit Piérick froidement.
Quatre heures plus tard, ils aperçurent l’entrée du mont Drastian. Une caverne immense, haute de quinze mètres, entourée de gravures antiques représentant des démons venus d’autres dimensions. Personne ne savait qui les avait sculptées ni pourquoi.
En franchissant le porche, une sensation de gigantisme et de menace s’imposa. Les regards des statues semblaient peser sur eux comme un avertissement.
— Oyez, voyageurs ! Déclinez vos identités !
Un garde de la guilde des chasseurs les arrĂŞta.
— Piérick, chasseur de rang double A, avec sa compagnie, se présenta-t-il.
— C’est un honneur, répondit le garde, rendant leurs badges.
— Avez-vous vu d’autres chasseurs aujourd’hui ? demanda Marie.
— Habituellement, des dizaines entrent chaque jour, mais à cause des tensions, presque plus personne. Aujourd’hui, seuls deux chasseurs de bas rang sont passés.
— Avec un Umas domestique ?
— Oui. Vous les connaissez ?
— Oui, ce sont des amis. Merci, répondit Grog.
Morlin lança un regard meurtrier au garde, prêt à tuer à la moindre provocation.
Ils pénétrèrent dans la grotte à dos de montures. Le plafond culminait à plus de 25 mètres, menaçant de stalactites. Le passage était éclairé par des cristaux verts et des lucioles. Le tunnel faisait près de 15 km.
Le chemin serpentait entre marais bouillonnants et champignons géants. Quelques monstres restaient, mais ce n’étaient que vers géants ou brigands ratzes.
— Accélérons, on doit les rattraper, suggéra Morlin.
Piérick acquiesça. Grog et Herbs, Rainevars habitués à ces lieux, prirent la tête.
Soudain, Grog disparut sans prévenir.
— Qu’est-ce qui se passe ? cria-t-il avant de tomber dans une fosse. Des piques d’acier l’avaient transpercé. Sa monture gisait morte.
Il toussa du sang, sa vision s’estompa alors que ses compagnons appelaient à son secours.
— Putain, c’est quoi ça ? cria Morlin.
— Tu crois que c’est Fanel ? demanda Marie.
— Oui, la route est piégée, répondit Piérick.
— Espèce d’enfoiré ! murmura Vector.
— Nous vengerons nos morts, mais il faut avancer et les rattraper, dit Piérick.
Marie alluma un orbe lumineux, éclairant le chemin avec prudence.
Après quelques mètres, une flèche transperça l’épaule de Marie. Elle tomba de sa monture, qui s’enfuit paniquée.
Piérick, Morlin et Vector s’abritèrent derrière une roche. D’autres flèches fusèrent.
— D’où ça vient ? murmura Morlin.
Vector retira la flèche du bras de Marie.
— Les archers sont à environ douze mètres dans cette direction, chuchota Piérick.
Morlin lança un chant, faisant jaillir des colonnes de flammes qui surprirent les archers.
Piérick décocha cinq flèches qui atteignirent leurs cibles : des ratzes.
— Ces brigands nous ont coûté nos montures, grommela Vector, tirant encore sur la blessure de Marie.
— Je ne suis pas sûr que ce soit que des brigands, murmura Piérick.
Au même instant, Vector s’effondra, un trou béant traversant son crâne.
Un guerrier en armure apparut devant eux.
— Je vais le tuer ! cria Morlin, courant à l’attaque.
— Attends, c’est dangereux ! cria Piérick.
Marie s’écroula, un petit être à la fourrure sombre et tachetée de rouge lui plantant ses griffes dans le cou.
Piérick dégaina sa dague, mais le Umas était déjà parti dans l’ombre.
Morlin luttait avec le guerrier, que Piérick reconnut : l’homme qui avait accompagné Fanel au camp.
Piérick chercha du regard Fanel, le Umas et l’Estrayante.
— Aaargh ! hurla Morlin. L’armure du guerrier se déforma soudain, se transformant en piques acérées qui transpercèrent Morlin.
Piérick sortit de sa cachette, visant le guerrier, quand il sentit une chaleur cuisante sous le menton.
— Échec et mat ! lui souffla une voix dans son dos, alors que la lame lui transperçait la langue et le palais.
Le noir l’engloutit dans une douleur insupportable.
FICHE D’INFORMATION
Le Phororhacos
Le phororhacos est un oiseau qui ne vole pas, doté d’une énorme tête et d’un bec puissant. Il mesure trois mètres de haut (deux mètres aux épaules).
Il est couvert de plumes gris foncé et marron. Un adulte mâle aura une crête rouge et une touffe de plumes d’un orange éclatant derrière la tête. Les pattes sont gris clair avec des griffes noires.
Le phororhacos possède une voix caverneuse et résonnante. Il émet un féroce cri de bataille lorsqu’il combat ou défie un autre mâle sur son territoire.
Les femelles, plus petites que les mâles (entre 2 m et 2 min 50 s) sont assez dociles et peuvent être éduqués pour devenir des montures à l’aise dans les domaines forestiers et semi-désertiques.
FICHE D’INFORMATION
L’Orc
Les orcs sont des humanoïdes carnivores qui se regroupent en tribus pour subsister en chassant et en s’attaquant aux autres races. Ils pensent qu’ils ne pourront survivre que s’ils parviennent à étendre leur territoire.
Leur apparence est extrêmement variée, en général, ils ressemblent à des humains primitifs à peau gris-vert couverte de poils drus. Ils se tiennent légèrement courbés, ont un front bas et proéminent ainsi qu’un groin en lieu et place de nez.
Leurs dents canines sont parfaites pour manger de la viande crue et leurs oreilles pointues ressemblent à celles d’un loup. Les mâles font entre 1,95 m et 2,25 m de haut, les femelles une quinzaine de centimètres de moins. Leur armure est toujours sale et souvent rouillée. Ils parlent leur propre langue suivant leur tribut.
Ils ont appris à parler le commun, mais ne le maîtrisent pas très bien.
FICHE D’INFORMATION
Le Ratze
Les ratzes sont de petits humanoïdes semblables à des rongeurs, 80 cm à 1 mètre de hauteur ; originellement natif des zones souterraines des déserts secs et des plaines.
À l’image des groupes de rats auxquels ils ressemblent, les ratzes sont des bricoleurs qui adorent accumuler tout un tas de biens.
Les ratzes chérissent leurs monceaux de précieuses babioles bien plus que l’argent et préfèrent s’en procurer davantage, au lieu d’accumuler de simples pièces d’or. Il n’est pas rare de voir une équipe ratzes se donner au brigandage et au pillage.
Les ratzes sont des fervents commerçant, tant qu’ils peuvent accumuler des babioles, ils vendront leurs âmes et leurs services à n’importe qui.
Les ratzes parlent le commun et leur propre langage de couinements.

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