VOTRE DÉFI

Couleur « jaune »

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La lune est haute dans le ciel. Ils me traquent. Je le sais.

Mais... Je n’ai pas peur. J’ai toujours réussi à leur échapper. Aujourd’hui ne sera pas différent, je serais la plus forte. Toujours la plus agile.

De toute façon, ai-je vraiment le choix ? Je suis née ici et maintenant, c’est ma vie. Je ne sais faire que ça, et il faut bien que je mange !

Je sais que l’homme n’attend que d’apercevoir mon joli minois pour me tomber dessus. La semaine dernière, j’ai été imprudente et j’ai bien failli me laisser prendre dans ses filets. Mais il est juste écœurant, gras et sale, pas question qu’il me touche avec ses sales pattes.

Où est ce passage, déjà ? Ah oui, juste derrière la grande armoire. Ma famille ne m’appelle pas Passe-muraille pour rien : je suis capable de me faufiler partout. Cet itinéraire différent est plus sûr, il me permet d’éviter de passer dans la boulangerie, et d’accéder directement à la cour, puis à la réserve. La nuit, c’est encore mieux, puisqu’il n’y aucun éclairage dans cette partie du domaine.

Je dois juste rester concentrée et faire attention au nouveau locataire.

Bon, j’avoue, mes chapardages incessants les agacent fortement désormais. Pas étonnant que la maisonnée ait fait appel à un spécialiste. Je ne l’ai entraperçu qu’une fois, quand je passais au-dessus du salon, me faisant toute petite, quasiment aplatie sur le sol, rampant en retenant ma respiration. Il a un air terrifiant. Ses yeux sont jaunes, vicieux, méchants. Il a déjà montré ses compétences, ma mère n’a pas su lui échapper... S’il vous capture, il est sans pitié.

Mais... Je suis la Passe-muraille, non ? Je le sèmerai, comme j’ai semé les précédents, ceux qui ont été renvoyés ! Doucement... A pas de velours... Prudence... La réserve est là, juste devant. Avec tous ses trésors : de quoi me remplir l’estomac et oublier la faim qui me tenaille si souvent. Les temps sont durs pour tout le monde, les denrées sont si rares... Et chacun les protège comme il peut.

Je frémis... Je sens quelque chose, je suis sûre qu’il m’épie. Une silhouette, là-bas ? ... Non, rien... Pourtant, mon instinct me crie le danger. Je me recroqueville dans l’ombre, j’observe, le cœur battant. Rien dans l’air. Pas un son...

Bon sang, je ne vais pas attendre ici que le jour se lève ! Je dois m’y risquer.

Un dernier coup d’œil à droite, à gauche, et je m’élance.

Mes griffes crissent sur le gravier quand sa grosse patte grise frôle mes moustaches ! C’est vraiment de justesse qu’il ne m’a pas arraché la tête ! Je prie mes petites pattes de me propulser vite, plus vite, loin de ce gros matou horrible.

Je sens son haleine, j’entends son miaulement de rage derrière ma queue : il est trop proche !

Je me glisse de justesse sous la porte, et je l’entends se cogner contre le bois. Mes poumons sont en feu, et je tremble comme une feuille. Cette fois, c’était limite !

Mais... Je suis la Passe-muraille !